Le cil dense du silence

© Photographie Benoit Pradeau.

 

                         Le cil dense du silence

     

      Comme la fontaine d’ivresse est limpide ce soir!

      Elle semble fondre dans les rides de la lune.

      Ah! La lune!

      Les étoiles semblent l’ébouriffer

      Le cheveu de la nuit est tombé

      Retrouve-le pour en faire un fil d’argent

      Qui craque sous l’aurore aux doigts de ruse.

      Retrouve-le, la terre semble chauve

      Sans cette chevelure lunaire.

      Je l’ai trouvé, pourquoi boucle t-il

      Sous l’humidité du dédain?

      

      Chaque pas dans les ruelles fantomatiques pleure

      La larme de ta course éclabousse la grande Ourse,

      L’Ourse qui meugle à la lune voilée de soie

      Ah! La lune !

      J’ai craché sur le crochet du criquet caché,

      Il se cache sous la torpeur des ténèbres funèbres

      Je n’aime pas les lâches qui se cachent, montre-toi.

      Ah! La lune! Montre-toi.

      Ah! Lune, allume cet agrume du ciel amer.

      De la platitude embourbée dans le noyau terrestre,

      Je t’observe, serve de ta carapace grisonnante,

      Rapace de l’horizon.

      

       Tu es l’unique grain de beauté sur le visage de l’humanité.

       Le hanneton haletant souffre de ta luminosité,

       Cette lumière déchirante, déchiffrante, défrichante

       Où te caches-tu lâche?

       L’obscurité n’est pas un masque de fuite.

       Ton humble hurlement huile nos humiliations

       Ne hurle plus! Donne-nous un coup de main

       Pour un coup de foudre.

       L’infirme ingratitude, l’infortune infidèle

       Nous infestent.

       L’infernal infini s’ingénie d’infester l’Infructueuse

       Ah toi! Lune l’Ingénue!

            

       Le vent défait ta chevelure noirâtre,

       Catastrophe déchirée, cataclysme chiffonné.

       Mon œil a percé ta joue infantile. Tu pleures.

       Je me suis confondue avec le vent, si léger,

       Si amoureux de toi l’Ingénue.

       Ah lune si nue dans la nuit.

       J’envie ta nudité impudique,

       Ton rayonnement corrompu par tes lucioles.

       Lune pourquoi? Pourquoi la nuit est-elle borgne?

       Parce que l’autre lune est tombée.

 

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